28 novembre 2010

Un long dimanche

Aujourd'hui, j'ai eu une belle surprise en me réveillant ce matin. Mon jardin et le lotissement alentour étaient blancs d'une belle neige vierge de pas. Il neigeait toujours, d'ailleurs. Je me suis longtemps promenée sur le terrain familial, goûtant avec bonheur le silence et la curieuse tiédeur de l'air. J'ai passé le reste de la matinée sur à me promener sur internet et à grignoter clémentines, pain d'épice et gingembre confit.
À midi, j'ai dégusté avec quelques bons fromages un terrible Bergerac, aussi fort qu'un porto. Ce vin acre et puissant portait le nom d'un livre de Pagnol et m'a logiquement aiguillée vers un autre gascon célèbre. J'ai passé l'après midi près de la cheminée avec Cyranno et mon thé de Noël irlandais. Nous étions fort bien, tous les trois. Les délectables vers de Rostand m'ont fait un peu oublier la perspective du lundi et mes quatre-vingt quinze livrets de compétences à remplir d'ici les vacances.

25 novembre 2010

Polina Semionova par Peter Lindbergh

Pour clore le sujet, voici quelques images d'une série publiée dans le Vogue allemand. Il s'agit d'une très belle rencontre entre la danse et la mode puisque Polina Semionova, danseuse russe de renommée mondiale est ici photographiée par Peter Lindbergh.













On admirera au passage la force qui se dégage des membres de la ballerine et l'implacable précision des mouvements.

23 novembre 2010

Coule !

Pendant toute cette sombre période d'octobre à novembre, j'ai cru à un moment que le ressort claquerait, que je lâcherais : le repos, enfin. C'est un verre à la main, au téléphone avec une amie chère que j'ai eu soudain cette certitude. Je n'arrêterais pas. L'éthique peut-être, l'orgueil sûrement.

Très peu de gens savent à quel point c'est dur, aliénant. On n'en sort jamais, on ne déconnecte jamais. Le travail à faire, à faire faire, à refaire est en permanence sur un coin du bureau mental avec un en-tête « urgence ».

Par la force des choses, je suis devenue une machine. Une machine à enseigner. Une sorte de photocopieuse-trieuse hyper perfectionnée avec option correcteur orthographique et calculatrice intégrée. Et puis, malgré tout le temps passe, on se résigne à s'habituer. Au cataclysme de début d'année succède une routine de l'abattage, de la solitude et des préparations bâclées.

Pour finir, soins aidant, réapparait sous les strates de détresse, de fatigue, de colère la Fileuse que j'aime bien. Celle qui s'intéresse aux autres, qui sourit, qui réfléchit, qui a envie de faire. Dommage simplement que l'excavation soit chimique.

Plus que trois semaine.

12 novembre 2010

En danseuse.

En ce moment, j'aime donc beaucoup m'inspirer de l'univers de la danse classique. Rien de plus facile en effet, on trouve dans tous les magasins de quoi jouer les Pavlova du dimanche.

J'ai choisi une jupe Promod en guise de tutu, très joliment brodée façon guipure, légèrement plus subtile que les superpositions de tulle que l'on peu voir partout. Je ne peux pas m'empêcher d'y retrouver un peu les costumes de Gisèle ou des Sylphides...



Une petite laine (mohair ou cachemire) par là dessus et une paire de guêtre (j'en possède de toutes les couleurs tant je les trouves pratiques) car les salles de répétition sont froides. Des ballerines enfin, Repetto bien sûr (merci Ebay).




Finalement, je reprend goût aux talons plats et aux gros pulls (mais pas jacquards pitié !) si ils sont allégés par un jupon brodé. Quitte à jouer les fonds de corps de ballet sur le retour, je trouve que le style Bolchoï permet de passer l'hiver de manière à peu près gracieuse.

9 novembre 2010

Impression soleil levant

Il est sept heure trente, peut être huit heure.
Le jour se lève mais le port est déjà réveillé, en dépit de la morte saison.
Un voilier traverse le bassin, deux marins hèlent un quidam sur le quai. En continu, le cliquetis des drisses, et au loin, le grondement des autos.

Le bus s'astreint à quelques arrêts de rigueurs, progressivement accélère et s'élance sur la corniche. La mer est de métal et luit sous des cieux d'aquarelle. Balises et récifs se découpent en ombres chinoises. L'œil vert du phare opère une trouée par intermittence. Au bord de la route, les orgueilleuses maisons d'armateurs exhibent des charmes bourgeois un tantinet défraichis. À gauche, les façades des villas, alignées comme dans le décor d'un western, à droite la rambarde à pic donnant sur les rochers. L'impression est à la fois balnéaire et sinistre. C'est splendide.
Un dernier virage, l'immensité des flots est offerte au regard pendant une dizaine de seconde.



A cinq cents kilomètres de là, une foule anonyme peuple le métro et s'entasse dans les RER. Je me dis alors que j'ai de la chance, beaucoup de chance.

6 novembre 2010

Inspirations pointues

Depuis peu, j'aime bien jouer les danseuses du bolchoï en retraite. Quelques inspirations.





Tutu d'Odette (porté par la mythique Pavlova)
Sabine Leblanc & Nicole Amigues,(Photo by Walter Sanders)
Bolshoi Theater (Photo by Howard Sochurek)
Polina Semionova (photographe inconnu)

3 novembre 2010

La Femme sous l'horizon, Yann Queffelec

Les souvenirs, c'était de la fausse monnaie, des hochets pour les mourants.
Jean-Marc Parisis, Les Aimants


Une sombre demeure, un terrible secret de famille, la haine entre une princesse russe et une tsigane, une enfant blessée à la recherche de ses origines, la mort, autant de thèmes fascinants (les mauvaises langues diront accrocheurs) qui traversent le livre de Yann Queffelec. On y trouve les figures tutélaires de l'imaginaire russe (le Domovoï, Baba Yaga, le Samovar, les plaines de Sibérie,...) et celle du fantastique européen : la forêt, le loup, le chevreau, l'orpheline, le village, le lac drapé de brume. Accumulation de clichés vendeurs ? Peut être. Toujours est-il qu'on est véritablement emporté par cette terrible histoire d'amour et de mort. La femme sous l'horizon est construit comme un conte d'horreur pour adultes. Le plaisir de lecture est réel, à la première comme à la dixième lecture tant on se régale de cette galerie de portraits hétéroclites et démentiels. Chaque personnage pourrait en effet faire l'objet d'un roman à lui tout seul.
Dès la seconde partie du livre, on passe d'un monde presque onirique (la vie dans la forêt, l'enfance) à un labyrinthe bourré d'impasses quand l'héroïne devenue adulte arrive à Paris. Le balancement entre le réel (la ville, la mort) et le mensonge (la comédie de l'aïeule, le cabaret tenu par de faux russes) est traité de manière intéressante et développe tout au long du récit une autre problématique que je trouve passionnante : la valeur du souvenir : drogue dure (la grand mère), religion (l'oncle), poison (le père), malédiction (Tita, l'héroïne).
L'auteur s'interroge aussi sur le caractère très chancelant de l'identité : est-on soi même en propre ou ne sommes nous que les strates accumulées d'un passé familial (Tita se fond dans la figure de Carmilla, sa mère) et à travers le destin tragique de l'héroïne évoque la difficulté de se construire et d'échapper à la fatalité du destin. En effet, le sort de Tita balance sans cesse entre résilience et prédestination.

Zénaïda Sérébriaskova, Toilette (autoportrait), 1909.

Ce récit m'a enchanté, même s'il comporte de nombreux défauts (clichés, construction bancale, personnages caricaturaux...). Ce n'est pas un chef d'œuvre, mais un livre plein de charme, original et inoubliable, à la manière des contes de veillée. Le style y est charnu, avec parfois de belles trouvailles, des morceaux de bravoure, et quelques maladresses. La femme sous l'horizon est finalement une œuvre inclassable que ses défauts ne rendent que plus attachante encore.